Syndrome de la page noire



Peur de publier. D’être lue. Reconnue. Même peur que dans la rue.  

Ou pire ! Peur d’être ignorée. Délaissée. Dédaignée. 

S’effacer pour se faire remarquer.  

Paradoxe du trouble si souvent répété, diagnostic prémâché, auquel je ne me suis pourtant jamais identifiée. 

Et si c’était vrai ? 

Plus d’un an que je n’ai rien publié. Pour que personne ne voie. Pour que personne ne sache. Ce que je suis, ce qui m’est arrivé. Et qui, dans mon esprit, me définit. 

La honte est réapparue, la fierté s’est tue.  

Je me suis détournée d’un projet que j’avais porté pendant des mois, en lequel je croyais plus que tout. J’ai voulu l’enterrer, et avec lui, mon passé.  

Qu’est-ce qu’on en penserait ? Qu’est-ce qu’on en dirait ? De moi, de ces années troubles. Rien, peut-être. Sûrement, même. Rien ne changerait, mais la peur est là. 

Ecrire, c’est se dévoiler, se révéler, s’exposer aux critiques, aux jugements, quels qu’ils soient. Et tout cela me fait peur.  

Voici ce que j’ai récemment écrit à une jeune autrice engagée comme je l’étais autrefois : 

« J’étais tout aussi déterminée à devenir plus active dans le combat contre les TCA avant de ressentir le besoin, quelques mois après la sortie de mon livre, de tourner la page en retombant dans le silence, comme pour essayer d’oublier. Une fois les mots sortis, couchés sur le papier, ils ne hantaient plus mon esprit, et j’ai voulu les laisser reposer pour de bon en m’en détachant, en n’y étant plus associée. » 

Je ne voulais plus ni en parler, ni qu’on m’en parle.  

Pendant cette année de silence, je me suis sentie libérée mais également coupable d’abandonner ce que j’avais commencé, coupable de ne plus avoir le courage de défendre mes idées ainsi que les personnes que je voulais aider. 

D’autant plus que cette absence ne m’a pas permis de « tourner la page » comme je le souhaitais.  

J’ai continué de vivre dans ce monde que je me suis créé, de nourrir le cercle vicieux dans lequel je suis toujours engluée. Mais je ne voulais plus en parler. Je voulais me cacher. Me renfermer.  

Depuis quelques jours, j’ai envie de publier.  

Cette reconnaissance qui me fait si peur me donne également envie de briser de nouveau le silence. Car je veux que mon livre soit lu, et mon message, entendu.  

Je veux qu’il apporte à celles et ceux dont il tombera entre les mains ce que m’apportent les témoignages que je lis et qui m’accompagnent dans mon parcours, en m’aidant à me sentir moins seule et à poser un œil neuf sur ce que je vis. 

« […] chacune de ces lectures m’apporte quelque chose, en modifiant le regard que je porte sur ces maladies et certaines de mes croyances qui se révèlent être erronées bien que je vive ce phénomène de l’intérieur moi aussi. » 

Ainsi, je veux de nouveau écrire pour partager mon expérience, mais également celle d’autres combattantes dont je suis moi-même lectrice.

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