Tous les jours, je parcours du regard les deux bibliothèques disposées de part et d’autre du téléviseur qui trône dans le salon. Tous les jours, je me dis que je devrais les lire. Tous les jours, j’ai envie d’acheter de nouveaux livres, bien que je ne parvienne même plus à les ouvrir.
Pendant quelques semaines, je me suis retenue de céder à cette compulsion, pour finir par “craquer” il y a quelques jours. J’y suis allée fort et je suis rentrée chez moi avec pas moins de douze livres pour une somme indécente qu’il aurait mieux valu que j’économise.
Cela faisait longtemps que je n’avais pas éprouvé autant de honte et de colère envers moi-même. L’euphorie de cette acquisition a rapidement fait place à un mélange d’émotions et de pensées dépréciatives que je n’ai pas su gérer et dont je ne me suis encore pas remise.
Plus j’en ai, moins je lis. Plus la pression grandit et plus je me sens comme au pied d’une montagne impossible à gravir. Alors, quand j’ai tendu la main pour saisir le livre que j’avais choisi de lire cette après-midi, j’étais plus que nerveuse, envahie par un mélange d’excitation et de peur, à mi-chemin entre l’envie et l’angoisse de ne pas y arriver.
Pour moi, les premiers mots sont toujours les plus durs. Je peine souvent à entrer dans un univers, quel qu’il soit, à recueillir la concentration et l’énergie nécessaires à cette entreprise. Mais une fois commencé, je ne m’arrête plus. Je ne me laisse pas le choix. Est-ce que je prends du plaisir à lire ? Bien sûr. Je crois que je n’ai jamais trouvé de sensations égalables. Mais c’est plus qu’un loisir, c’est un véritable défi, un challenge que je me lance, une compétition entre moi et moi-même. C’est à celle qui ira le plus loin, qui finira le plus vite, qui s’arrêtera le moins souvent.
L’heureux élu de cette après-midi n’y a pas échappé. Avoir m’avoir laissé perplexe, déboussolée, je me suis retrouvée plongée dans un étang, un océan de poésie qui n’a pas tardé à me rappeler ce que j’aime dans la lecture : la légèreté, l’impression de voler, de me laisser porter par un ineffable mouvement de beauté.
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